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La graphorrhée du monoblogue
1 octobre 2012

« Vocation »

J’ai, il y a maintenant un peu plus de 5 ans, tenté les concours des instituts de formation en soins infirmiers. Cela dans un seul objectif : devenir infirmière en psychiatrie.

Je suis issue de la formation qui avait été mise en place lors de la réforme de 1992 : au cours de mes trois ans et demi d’études, j’ai pu effectuer quatorze stages de quatre semaines, un stage de huit semaines dit « pré professionnel » et un stage de cinq semaines, celui comportant en sa fin l’épreuve du Diplôme d’Etat, D.E. tant redouté : trois ans de pratique, d’évaluations, de stress et de rencontres, de soins, de ratages et de rattrapage, bref, d’apprentissage, trois ans de galère évalués en quelques heures, sur trois ou quatre soins.

Seize stages, soit soixante-neuf semaines.

Je n’avais, au tout début, jamais eu l’occasion de fréquenter le milieu des soins, et j’ai débarqué dans mon premier stage, en médecine interne, comme une poule se retrouve devant un couteau. J’étais incapable, non opérationnelle. J’avais tout à apprendre, et on ne m’a pas vraiment détrompée.

Dans un premier temps, je me suis cognée à de sérieux anti-modèles : mes référents de stages. Infirmiers, aides-soignants ou médecins négligents, stressés, angoissés, maltraitants et pervers pour les pires, et quelquefois même complètement à côté de la plaque, dans une application qui forçait le respect. De mon regard de novice, découvrant absolument les bases de la pratique infirmière, j’ai observé ce que je ne m’attendais pas du tout à voir -  ceci étant en partie normal, ce qu’on découvre dans un premier temps ne ressemblant pas tout à fait à ce qu’on s’imaginait.

De ce fait et de celui de mon idéal, jusqu’à mon milieu de troisième année, je n’avais rencontré aucun lieu de stage me paraissant accueillant par la suite – aucun service ne m’attirait pour en faire mon quotidien professionnel pour quelques années.

En tout et pour tout, au travers de mon long et chaotique parcours de stagiaire, je n’ai croisé que peu de personnes qui avaient encore envie d’être là, de soigner, de donner et recevoir, de transmettre, de partager.
Je ne me suis jamais dit que je ne deviendrais pas comme "eux". J’ai toujours eu à l’esprit que ces gens n’étaient pas aigris par plaisir, et pas maltraitants en leur âme et conscience, sinon, mis à part le lot de pervers présent proportionnellement dans tous les métiers du monde, ils s’arrêteraient de suite, entameraient une thérapie, et/ou changeraient de métier.

Ce fut une grande question, dès mon premier stage : comment des personnes ayant envie d’être dans ce secteur là pouvaient-elles en arriver à de telles dérives ? Comment un tel écart entre le soignant plein d’idéaux et la blouse blanche implacable pouvait-il se creuser, parfois si vite ?

Tout cela pour essayer de voir comment je pouvais moi-même éviter de me transformer en monstre malgré moi.

Il y a les soins « relativement soignants ». Ceux qui se cachent sous le « on a pas le temps » « on fait au mieux avec ce qu’on a » « en vrai je sais pas trop comment on fait mais je fais quand même ».

Il y a les mauvaises habitudes, les dynamiques d’équipe dépressogènes, les leaders du bas de l’échelle qui ont des moyens de pression sur tout le monde. Les personnalités perverses qui peuvent pourrir les meilleures initiatives soignantes.

Mais il y a aussi et surtout le débordement professionnel de tout le monde. Des agents administratifs et des soignants, des travailleurs sociaux qui ramènent du travail chez eux, qui cumulent les heures supplémentaires. Qui n’ont plus le temps de voir les patients, encore moins de leur parler. Cette facette là de l’exercice professionnel ne m’est que trop bien apparue lors de ma prise de fonction. En tant que stagiaire, je percevais, je devinais, on m’expliquait comment cela fonctionnait. Mais je restais relativement étrangère à ces contraintes.

Inutile de me demander d’où vient ma haine de l’administration « rouleau compresseur » que connaissent toutes les structures de nos jours. Seulement, à l’hôpital, quand en fin de chaîne se trouve le patient, c’est un peu embêtant.

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